Dvandva

Le Hatha Yoga, apparu vers l’an 1100 de notre ère et fondé sur la philosophie tantrique, considère le yogin comme un être orienté, son corps le situe dans l’espace et le temps.
La face antérieure du corps est tournée vers l’est ( purva, symbole du soleil levant, de l’avenir ) et la face postérieure est vers l’ouest ( paschima, symbole du soleil couchant, du passé ).

C’est « la voie de l’action » qui est privilégiée et les perceptions sensorielles et énergétiques sont plus importantes que les spéculations mentales.
« Il place l’expérience directe au coeur de la sâdhanâ (discipline). Celle-ci consiste à réaliser, dans le corps du pratiquant, l’union des principes masculin et féminin, à recréer l’unification de l’être et le réveil de ses potentialités énergétiques. » *
Le corps est le lieu de l’éveil de la conscience qui nécessite une présence totale.
Le corps est asymétrique mais l’axe central, la colonne vertébrale, unit les côtés opposés ( droit – solaire (HA)- masculin et gauche – lunaire (THA)- féminin ) et les énergies de la matière (Terre) aux énergies spirituelles (Ciel).

« Toutes les postures ont pour vocation d’améliorer la circulation de l’énergie dans cet axe central, de libérer la colonne vertébrale, ôtant les obstacles à la circulation de Prâna. » *

La séance de yoga prépare à la verticalité en travaillant d’abord dans les trois plans : frontal (gauche-droite), sagittal (avant-arrière) et transversal (haut-bas).
Ainsi le yogin et la yogini affinent la perception de leur schéma corporel et discernent de mieux en mieux les différences propres à l’asymétrie fondamentale du corps humain. Car on ne peut pas réunir si au préalable on n’a pas discerner (viveka – le discernement en sanskrit, si important pour le yoga).

Les énergies ou les qualités opposées et complémentaires, qui nous constituent tous, sont aussi au coeur des Yoga Sûtra de Patanjali qui énonce :

sûtra II – 46 : sthira-sukham-asânam . « La posture est ferme et agréable. »
sûtra II – 47 : prayatna-shaithilya-ananta-samâpatti-bhyâm. « Combinant à la fois un effort intelligent et décontracté, et la méditation sur l’espace illimité. »
sûtra II – 48 : tatah dvandva-anabhighâtah. « En conséquence, il n’y a plus de perturbation consécutive aux couples d’opposés (dvandva). » **

« La pratique d’āsana augmenterait notre adaptabilité à des forces opposées nées de notre constitution ou de notre environnement. » Peter Hersnack

Les dvandva, les paires d’opposés qui caractérisent principalement tout processus de vie ( le jour et la nuit, le froid et le chaud, l’eau et le feu, la vie et la mort, le succès et l’échec, le rejet et l’envie… ), sont atténués, intégrés dans un état d’équilibre intérieur grâce à la pratique des âsana ( les postures ) et par la méditation.
« La pratique posturale se mesure en termes « d’assise intérieure », la souplesse et les contorsions n’y sont pour rien. » **

Le prânâyâma ( les techniques du souffle ) oeuvre dans le sens d’une harmonisation des souffles pénétrant dans les nadi, à gauche (idâ) et à droite (pingalâ) et s’unifiant dans le nadi central (sushumna), transportant l’énergie vitale et situé le long de la colonne vertébrale.

Le yoga est par essence le lien qui nous rend vivant et entier en nous permettant, par l’exercice corporel, les techniques respiratoires et les prises de conscience intérieures, d’adoucir nos clivages et nos contradictions, sources de tiraillements et de souffrance.

« En acceptant de ne pas être maîtres de la Vie, en acceptant de vivre les deux, nous avons accès à ce qui est UN, au-delà de deux. » Peter Hersnack

  • Boris Tatzky – Revue Française du Yoga n°14 – FNEY juillet 1996
  •  Frans Moors – Patanjali Yoga-Sûtra – Les Cahiers de Présence d’Esprit -2012
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